Grand
Place, 1979
ROSES
ROUGES ET ROSES
Oui,
je l'avoue : cette photo est un plagiat. J'avais vu dans un
magazine, un an auparavant, une photo semblable faite par Jay Maisel
à Paris. « Je ne me souviens plus de l'endroit »,
disait-il, « Qu'importe ! On retrouve cela dans tous les
marchés des quatre saisons de Paris ». C'était en 1978.
Cette
photo à été prise sur la Grand Place de Bruxelles. En ces
années-là, il s'y trouvait encore un marché aux fleurs. Mais comme
pour le marché aux oiseaux, qui se tenait le dimanche matin, il en a
été chassé pour laisser la place aux hordes de touristes qui
l'envahissent quotidiennement. Bruxelles aura perdu là un peu de son
âme, que ne saurait compenser ce qu'elle a gagné en espèces
sonnantes et trébuchantes que ces nouveaux barbares apportent dans
leurs valises.
Les
roses expriment l'amour. Absolu pour les rouges, tendre et doux pour
les roses. Le langage des fleurs était encore entendu en ces
temps-là, avant que les téléphones portables et leurs messageries
instantanées substituèrent l'expression crue de sentiments
immédiats et frivoles à l'évocation pudique d'une passion
profonde. Autres temps, autres mœurs ; autres moyens de
communication et des sentiments qui s'y accordent. On ne saurait
négliger combien notre obsession d'être « en contact »,
à tout moment, en tout lieu, aura dégradé la sincérité de la
relation entre les êtres.
C'est
pourquoi j'aime cette photo si simple, si facile, et pourtant devenue
tellement parlante depuis la quarantaine d'années qu'elle dormait
dans mes archives. Aujourd'hui la voilà soudain pleine de sens et
qui prend vie.